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Loi Littoral et camping

Application du principe de l’urbanisation en continuité

 

Conseil d’Etat 16 décembre 2016 Commune de Pénestin n° 389079

 

 

Résumé :

Par une décision du 16 décembre 2016, le Conseil d’Etat est venu préciser que, l'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont soumis aux règles relatives à l'extension de l'urbanisation du code de l'urbanisme selon lesquelles cette extension doit être réalisée, soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement.

Par une délibération du 11 octobre 2010, le conseil municipal de la commune de Pénestin a approuvé son projet de plan local d'urbanisme, dont le règlement autorise dans les zones 1AUe et 1AUer l'aménagement de terrains de camping et d'aires de stationnement de caravanes.

Plusieurs requérants, dont l'association « Les amis du pays entre Mès et Vilaine », ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler en tout ou partie cette délibération.

Par un jugement du 16 avril 2013, ce tribunal administratif a annulé les dispositions en cause, au motif qu'elles méconnaissaient les obligations légales en matière d'extension de l'urbanisation sur le littoral prévues par l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme (désormais L. 121-8 du Code de l’urbanisme). Par un arrêt du 2 février 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a confirmé ce jugement.

La commune de Pénestin s’est alors pourvue en cassation contre cet arrêt.

Par la décision du 16 décembre 2016, ici commentée, ce pourvoi a été rejeté.

1. Cette jurisprudence confirme que, outre l’obtention d’un permis d’aménager (article L. 443-1 du Code de l’urbanisme), l’ouverture d’un terrain de camping est soumise au respect intégral des dispositions de la Loi Littoral.

En effet, l’article L. 121-3 du Code de l’urbanisme prévoit expressément que la Loi Littoral est applicable « à toute personne publique ou privée pour […], l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes […] » (V. également article L. 331-1 du Code du tourisme).

S’agissant spécifiquement de l'aménagement de ces installations sur une commune littorale, des règles d’urbanisme particulières ont été prises.

Ainsi, il ressort du Code de l’urbanisme que par exemple, l'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont subordonnés à la délimitation de secteurs prévus à cet effet par le plan local d'urbanisme (L. 121-9), ou encore que, l'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes doit respecter les règles relatives à l'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage (L. 121-13 et -14). 

 

2. Si le principe de l’application de la Loi Littoral aux terrains de camping n’est pas contestable, la question se posait de savoir si le fait que le législateur ait consacré des dispositions particulières à l'aménagement et l'ouverture de terrains de camping, peut conduire à en déduire que cette forme d'urbanisation relève d'un régime particulier et peut, à ce titre, être autorisée à déroger au principe d'urbanisation en continuité (article L. 121-8 précité) ?

Par cette décision du 16 décembre 2016, le Conseil d’Etat est venu répondre par la négative à cette question.

Si le législateur a effectivement dédié plusieurs dispositions du code de l'urbanisme spécifiquement aux terrains de camping et de stationnement de caravanes, c'est eu égard aux particularités liées à cette forme d'occupation de l'espace littoral.

Toutefois, rien ne permettait d’en déduire que le législateur avait entendu exonérer les campings d’avoir à se soumettre au régime général de la Loi Littoral, en leur consacrant un régime particulier.

En conséquence, le Conseil d’Etat a jugé que : « l'aménagement et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes en dehors des espaces urbanisés sont soumis aux règles relatives à l'extension de l'urbanisation du code de l'urbanisme selon lesquelles cette extension doit être réalisée, soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ».

Pour aboutir à cette solution, la Haute Juridiction administrative s’est appuyée sur les travaux préparatoires de la Loi Littoral, lesquels n’évoquent aucunement un régime dérogatoire relatif aux campings.

L’utilisation de l’adverse « en outre » dans l’article L. 121-9 du Code de l’urbanisme ne laissait par ailleurs pas beaucoup de place à un doute sur ce point.

Enfin, cette solution va dans le sens de la jurisprudence des juges du fond (V. par exemple sur ce point Considérant n° 23 de CAA Marseille 2 juillet 2015 n° 13MA05165, BJDU 2015 p. 437).

En l’espèce, les premiers juges avaient relevé que les secteurs 1AUe et 1AUer créés par la délibération attaquée, qui autorisaient l'aménagement de terrains de camping-caravaning, et notamment, à cette fin, la réalisation d'équipements publics et de diverses installations nécessaires à l'exploitation de ces terrains ainsi que d'habitations légères de loisirs, ne pouvaient être regardés ni comme situés en continuité d'une agglomération ou d'un village existant, ni comme formant des hameaux nouveaux intégrés à l'environnement.

Les juges du Palais Royal ont donc tout logiquement validé le fait que, la création de ces secteurs par le PLU méconnaissait les dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors en vigueur (désormais L. 121-8 du même Code).

3. Si l’application de la règle de l’urbanisation en continuité n’est en l’espèce pas surprenante, il est toutefois possible de s’interroger sur une éventuelle contradiction entre la jurisprudence administrative et le Code de l’urbanisme.

En effet, à la lecture de l’article L. 121-9 de ce Code, il apparaît implicitement que en dehors des espaces urbanisés, des terrains de camping ou de stationnement de caravanes peuvent être autorisés.

Or, la jurisprudence administrative estime qu’il résulte de l’article L. 121-8 «  que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c’est-à-dire dans les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significative de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d’autres, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages » (CE 9 novembre 2015 Commune de Porto Vecchio n° 372531, publié au recueil sur ce point, auparavant CE 27 septembre 2006 Commune du Lavandou n° 275924, mentionné dans les tables mais sur un autre point).

Il est donc possible de voir une contradiction entre, d’une part, un texte législatif qui autorise implicitement l’aménagement et l’ouverture de campings « en dehors des espaces urbanisés » et une jurisprudence qui impose que ces constructions se fassent « dans les zones déjà urbanisées ». 

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